Growth hacker en 5 étapes

Eh oui, c’est le terme à la mode depuis 2014 ! Impossible de passer à côté l’exercice de définition de profil de poste, surtout après s’être attaqué aux dé-réferenceurs, dé-rankeurs et autres dés-optimisateurs SEO ! Voici donc la VRAIE clé (du succès) pour devenir Growth Hacker en 5 étapes-clés !

Growth dans ta face

C’est le (par ailleurs intéressant) article sur le sujet publié ici : http://www.cominmag.ch/le-growth-hacker-est-il-le-nouveau-marketer/ qui m’a motivé à rédiger cet article. Un peu la goutte d’eau qui fait déborder le vase en sorte…

En fait, on nous rabâche toujours la même rengaine sur ce que doit être le profil du Growth Marketer. Et si vous regardez bien, c’est ni plus ni moins que le mouton à 5 pattes si cher à nos amis recruteurs et autres chasseurs de tête… Eh oui, car l’expert Growth Marketing se doit d’être :

  1. Curieux : sa capacité à penser « out of the box » est l’atout différenciant majeur. Loin de la masse, son esprit curieux très critique lui permet de saisir les opportunités au vol
  2. Créatif : en allant plus loin que la simple curiosité, si les opportunités ne se présentent pas à lui, le growth marketer va les inventer !
  3. Audacieux : Inventer, c’est prendre des risques.
  4. Pugnace : Confère ci-dessus ! La prise de risque peut se solder par une échec. Il ne faut pas se décourager.
  5. Vif, force de proposition, autonome, capacité à apprendre vite et à se remettre en question pour adopter de nouveaux outils, méthodes ou techniques à la volée : le hacker n’attend pas « que ça se passe » et cherche à provoquer sa bonne étoile… Et si sa bonne étoile ne répond pas, il s’adapte en conséquence pour en trouver une autre !

En plus de ces traits de personnalité, on demande au Growth Hacker les compétences suivantes :

  1. Expertise en marketingwebmarketing
  2. Expertise technique (qui désigne communément le « hacker » adepte du RTFM)
  3. Expertise en auditanalysereporting : il lui faut pouvoir mesurer le ROI de tout ce qui est entrepris
  4. Excellent communiquant (Community Manager inside), et ce dans plusieurs langues (l’anglais pour au mieux digérer les documentations techniques et les langues des marchés sur lesquels la start-up souhaite s’implanter)

Human Resources Hacking

Vous l’aurez compris : le Growth Hacker est un Dieu ou un demi-Dieu. Alors comment faire pour faire partie du cénacle et intégrer le top5 des métiers les plus trendy et convoités (ceci provoquant cela) ? C’est pourtant simple, si vous avez lu jusqu’ici.

Il suffit de pipeauter.

De vous créer le profil qui fera rêver tous les chasseurs de tête.

Parce que, pour ceux qui en douteraient encore, le Growth Hacker commence d’abord par établir son succès pour s’en prévaloir par la suite. Par exemple, une vidéo en ligne sur le sujet met en scène un expert qui raconte sa success-story : il a fait ceci, il a fait une vidéo sur un sujet, et hop 1 mois plus tard sa vidéo enregistrait plusieurs milliers de vues. Mais bien évidemment, il reprend son exemple un peu partout, et bien évidemment il montre cette vidéo et l’adresse de la vidéo. Résultat : de plus en plus de gens regardent sa vidéo, il se fabrique sa propre audience au fur et à mesure, ce qui confirme de plus en plus son « expertise » avec un exemple de plus en plus probant.

On pourrait alors résumer que tout ça relève de la méthode Coué avec une bonne dose de storytelling, parce que, oui bon, on commence à connaître par cœur l’histoire d’I Love you par Hotmail et AirBnB. C’est beau, c’est culotté, ça fait rêver. Mais après ? ah oui, le type de success-story qui fait le buzz, ou plutôt du buzz qui devient success-story, on commence à le voir partout (l’auto-promo dont je parle plus haut). Ou alors, encore mieux, on répète bien entendu que le growth hacker ne dévoile pas ses recettes, sans quoi bien entendu si c’est repris par des centaines de petits malins ça ne marchera pas longtemps.

Et pourtant ! Des sites sur le growth-hacking ne cessent d’apparaître toutes les semaines. A croire donc qu’il y aurait des endroits pour échanger de la matière grise et un état d’esprit ingénieux (je ne mentionne pas les « bons plans », éventés avant tout partage ou dans l’heure qui suit). Oh wait… à moins que ces sites ne soient que des attrape-gugusses destinés :

  • A positionner l’éditeur du site comme un spécialiste sur le sujet (plus il en parle tôt mieux c’est : il pourra toujours clamer qu’il était un des premiers)
  • A lui permettre de grappiller quelques infos (c’est toujours ça d’économisé pour sa veille)
  • A lui permettre de fourguer ses trucs : un e-book, une formation, quelques pubs Adsense…

Les 5 étapes-clés pour devenir Growth Hacker

  1. Auto-proclame-toi expert sur le sujet
  2. Travaille comme un forcené et fais croire que tout te vient naturellement
  3. Emmures-toi dans une tour d’ivoire avec plein de jargon et de méthodes ésotériques s’appuyant lourdement sur du name-dropping
  4. Fais en sorte que tout ton reporting s’appuie sur des leviers que tu maîtrises et des métriques manipulables (par exemple les signaux sociaux : nombre de likes, de fans, de vues : tout s’achète)
  5. Le but du growth hacking dans la start-up c’est de faire gonfler la bulle spéculative : tu peux donc tout miser sur le court/moyen terme : une fois que la start-up est rachetée, pas grave que cette bulle éclate entre les mains de l’acquéreur !

L’étape clé numéro 2 peut avoir une variante pour les plus fainéants (intelligents ?) et manipulateurs :

  • Fais travailler les autres pour toi / Fais croire que tu travailles comme un forcené alors que tu achètes des packs de followers et que tu pompes la newsletter d’un obscur concurrent

GH : le constat

Et voilà. Il fallait en arriver là.

Le Growth Hacking, on l’est où on l’est pas. Mais ce qu’il y a de sûr, c’est qu’on le devient pas. Beaucoup de candidats mais peu d’élus !

Tout le phénomène de mode actuel autour du GH ne fait que répondre à la demande sur le besoin de renouveler l’emballage ou la terminologie. On fait du neuf avec du vieux : pirate, hacker, black hat, tout l’imaginaire et les mythes urbains chèrement vendus aux digital natives est concentré autour de ce positionnement ambigu propre à l’être humain : suivre les règles #ouPas, louvoyer, prêcher le faux pour savoir le vrai, manipuler, être opportuniste et prêt à exploiter les autres (parce que le coup de AirnB exploitant CraigList érigé en exemple, c’est quand même pas rien d’arriver à en faire un modèle…)

Bonus : le recruteur qui tue

Ah oui, un dernier truc. Voir des offres d’emploi (enfin, de stage) pour des Growth Hackers, c’est quand même pas pire que le collaborative crowdsourcing opéré par des multinationales lors de hackatons… Alors, in fine, je vous le demande :

QUI SE FOUT MOQUE DE QUI ?

Bon, ceci dit, certains qui se réclament du « mouvement » mettent en place des procédés de type AB/testing et d’acquisition qui sont loin d’être idiots. J’en avais juste marre de cet effet « magique » du mot-clé growthacking, et de tous ceux qui tombent dans le panneau en se faisant le relais d’un truc qu’ils ne comprennent pas.

Moi je me rappelle des premiers growth hackers : le type qui a fait fortune en commercialisant les pixels de la homepage de son site, celui qui a récolté une somme colossale avec son site de type « 1 euro pour ma pomme.com », ou plus récemment celui qui finance une salade de pommes de terre avec une levée de fonds de type « financement participatif » (crowdfunding) https://www.kickstarter.com/projects/324283889/potato-salad

Par concepteur-rédacteur le dimanche 12 mars 2017, 20:11